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    Pourriture "noble" ?  
       
 

Pourriture noble ! Il fallait oser associer ces deux mots, et en notre début de XXI siècle d'un hygiénisme parfois surnaturel, ce couple si on s'y arrête parait quelque peu provocateur.
D'après B Ginestet, ("Barsac Sauternes, Ed J Legrand), il aurait été inventé à la fin du XIXème siècle par le clergé, "auquel le seul mot de pourriture donnait des boutons allergiques" ; or, le clergé étant bon consommateur de ces vins, il était vital de les "dédiaboliser". En fait, ces curés oenophiles suivaient l'exemple de ces païens de grecs adorateurs de Dyonisos : l'adjectif "sapros" avait deux acceptions : l'une "pourri", l'autre "mûri, vieux, extra" quand il s'appliquait...à un vin..., et a donné, outre le mot "sapide", l'adjectif "saprien", en voie de disparition mais qui mériterait d'être sauvé, et qui s'appliquait les siècles précédents aux vins de "pourriture noble".

Espérons que celle-ci survivra aux diverses entreprises de certifications des chantres de l'asepsie totale...car à la surface d'une baie touchée par le botrytis, de multiples microorganismes pullulent, et il faut de bons arguments pour persuader le vendangeur de goûter ces grains parfois velus, d'un aspect que la morale alimentaire réprouve, mais qui sont délicieux et n'ont jamais rendu personne malade...

Pourtant le botrytis est la baguette magique de la fée des liquoreux...qui transforme une paisible citrouille, un brave raisin doré et joufflu gorgé de bon jus, qui ne demandait rien à personne, en un flacon plissé, tors et flétri , carrosse singulier, insoupçonnable contenant de quelques gouttelettes d'ambre jaillies de son alchimie. Un vin liquoreux obtenu naturellement, par le botrytis, est tout autre chose qu'un "vin sucré", qu'un jus de raisin où les sucres auraient été simplement concentrés. Le botrytis, outre qu'il fait perdre à la baie plus de la moitié de sa teneur en eau, modifie complètement la matière même du raisin, la transforme. Les vins qui en sont issus appartiennent à un autre monde, visuel, aromatique, émotionnel, un monde à peine visible, puisqu'il ne représente qu'à peine 1% des vins.

Aucun procédé "d'enrichissement" ou de "concentration" artificiels ne peuvent reproduire cette magie naturelle.

 
     
   
     
  1993 : les grains mûrs sont en voie de colonisation par le botrytis cinéréa.
     
  la colonisation est complète, les grains sont mauves, leur peau est devenue poreuse, ils commencent tout juste à flétrir : stade "pourri plein."
     
  Sur ces grappes, il est nécessaire de trier les grains car la botrytisation est hétérogène. Les vendangeurs ne prélèveront que les grains au stade "flétri", les autres seront vendangés au fur et à mesure de ce flétrissement, en plusieurs tries.
     
  1998 : sur cette parcelle enherbée, la botrytisation a été très lente et très saine : première trie à 22% potentiels le 5 novembre.
     
  Dernière trie de 1998, le 25 novembre
     
  Vendange 97 : "pourri sec", et le moût après le pressurage...